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Intelligence : le pessimisme culturel d’Erwin Schrödinger

Le célèbre physicien Erwin Schrödinger est né à Vienne le 12 août 1887. Une occasion de découvrir ses réflexions philosophiques pessimistes sur l’avenir de l’intelligence.

Alors que nous fêtons aujourd’hui l’anniversaire de la naissance d’Erwin Schrödinger, il est bon de rappeler que le célèbre physicien pionnier de la théorie quantique fut aussi passionné de philosophie des sciences, en particulier des applications de la théorie darwinienne de l’évolution.

Dans un essai publié en 1958 intitulé : L’esprit et la matière, il exprime une vision assez pessimiste, mais assez représentative de l’idéologie scientiste de l’époque, concernant l’évolution de l’intelligence au sein d’un monde moderne qui semble avoir mis entre parenthèses toute compétition dans l’évolution culturelle. C’est cette vision assez noire de l’effacement de l’intelligence face à la généralisation de la stupidité qui a été popularisée par le film de Mike Judge Idiocracy, dans lequel l’absence de pression de sélection favorisant les individus intelligents les fait disparaître de la surface du globe :

“Je crois que la mécanisation et la « bêtification » croissantes de la plupart des processus de fabrication ont pour conséquence la menace sérieuse d’une dégénérescence générale de l’organe de notre intelligence. Plus les chances dans la vie d’un travailleur intelligent et celles d’un travailleur borné sont égalisées par la répression de l’habileté manuelle et par la généralisation du travail fastidieux et ennuyeux sur la chaîne de montage , plus un bon cerveau, des mains habiles et une vue perçante deviennent superflus. En effet, l’homme stupide qui, naturellement, trouve facile de se soumettre à un labeur ennuyeux, sera favorisé ; il sera vraisemblablement plus facile pour lui de prospérer, de s’établir et d’engendrer une descendance. Le résultat peut même revenir à une sélection négative des talents et des dons.

La dureté de la vie industrielle moderne a conduit à certaines institutions conçues pour l’atténuer, comme la protection des travailleurs contre l’exploitation et le chômage, et beaucoup d’autres mesures d’assistance sociale et de sécurité. Elles sont à juste titre considérées comme avantageuses, et sont devenues indispensables. Pourtant, nous ne pouvons pas fermer les yeux sur le fait qu’en allégeant la responsabilité qu’a l’individu de s’occuper de son propre sort, et en nivelant les chances de tous les hommes, elles tendent aussi à exclure de la compétition des talents et à être ainsi un frein à l’évolution biologique.

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Erwin Schrödinger, L’esprit et la matière, Seuil, traduction M. Bitbol, pp. 228-29.

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