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Stocker des quantités astronomiques de données

Des données stockées sur une molécule synthétique: une première mondiale !

Des chercheurs français du CNRS ont réussi à écrire une courte phrase sur un polymère 

Comment parvenir à stocker les quantités astronomiques de données numériques produites, toujours en plus grand nombre, par notre société ? Le tout en utilisant physiquement moins d’espace, de matière, mais aussi d’énergie, transition écologique oblige... Des chercheurs du monde entier planchent sur cette question cruciale. Leur source d’inspiration est - comme souvent - ce que la nature a fait de mieux dans le domaine, à savoir l’acide désoxyribonucléique, plus connu sous le nom d’ADN. Une macromolécule biologique composée de deux brins appelés polymères. En clair, de deux longues chaînes de petites molécules différentes accrochées les unes aux autres dans un ordre précis et qui permettent d’encoder ainsi toute l'information génétique nécessaire au développement et au fonctionnement d’un être vivant. Rien de moins !

Et la science de chercher à reproduire cet ADN de manière à pouvoir y inscrire les informations de son choix. C’est ainsi qu’en janvier 2013, Le Point.fr vous annonçait que des chercheurs étaient parvenus à encoder sur ADN l’équivalent d'environ 5 millions de bits de données. Seulement voilà, certains chercheurs pensent que l’ADN n’est pas forcément le polymère de toutes les situations et travaillent au moyen de stocker des informations sur d’autres polymères, synthétiques cette fois.

Parmi eux, une équipe de l’institut Charles-Sadron de Strasbourg (CNRS) et de l’institut de chimie radicalaire de l’université d’Aix-Marseille, dirigée par Jean-François Lutz, vient de parvenir à inscrire un court message, en code binaire (celui sur lequel est fondée toute l’informatique), sur un polymère entièrement synthétique. Un encodage de seulement quelques bits, mais qui constitue une première mondiale !

"Nous avons fait ça avec des polyamides, mais nous aurions très bien pu le faire avec des polyesters", explique Jean-François Lutz, spécialiste des macromolécules à l'institut Charles-Sadron. "L’apport principal de nos travaux réside dans la méthode que nous avons mise au point et qui permet d’agencer les monomères de manière précise pour créer un message", affirme-t-il. Car, lorsque des scientifiques fabriquent des polymères de toutes pièces, dans leur laboratoire, les monomères qui le composent ont la fâcheuse tendance à s’organiser de manière totalement aléatoire. Comme si vous cherchiez à monter un collier sans pouvoir déterminer l’ordre des perles. Des conditions dans lesquelles il est impossible de rechercher la moindre esthétique et, dans le cas de nos polymères, d’y glisser la moindre information.

Dans leur polymère, les chercheurs français ont réussi à encoder l’équivalent d’une phrase composée de quelques mots. Un message lisible de la même manière que ceux inscrits sur ADN, par séquençage, mais qui est aussi instantanément effaçable. "Car, si notre polymère est stable à température ambiante, il suffit de l’amener au-dessus de 60 degrés Celsius et, comme dans mission impossible, ce message s’autodétruira !" indique Jean-François Lutz. "Nous l’avons aussi conçu sur la base de trois monomères, l’un codant pour le 1, l’autre pour le 0 et le troisième constituant une sorte de maillon faible, de manière à avoir des liaisons qui se casseront facilement lors du séquençage (une technique de lecture qui, comme son nom l'indique, repose sur le découpage des molécules en séquences, NDLR) et rendront ainsi le message plus facile à lire", ajoute-t-il.

C’est là tout l’intérêt d’apprendre à écrire sur des polymères synthétiques, même si cette technique est pour l’instant moins avancée. Car, comme l’ADN a été optimisé par l’évolution pour une tâche bien précise, à savoir conserver l’information génétique des êtres vivants, les chimistes pourraient alors sélectionner le polymère à utiliser en fonction des caractéristiques utiles à telle ou telle application. Ultrarésistant pour surpasser le temps de conservation possible sur ADN ou, comme celui-ci, facile à détruire, pour transmettre des informations hautement confidentielles.

Consulter l'article scientifique paru cette semaine dans la revue spécialisée Nature communications 

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