Les autorités s’alarment
Les autorités sanitaires alertent sur une recrudescence d’intoxications liées à des produits vendus comme du CBD mais contenant, sans l’indiquer, des cannabinoïdes de synthèse. Un phénomène en hausse depuis le début de l’année 2024, dans un contexte de flou juridique persistant.
Par valeursactuelles.com
L’Agence du médicament (ANSM) et l’Anses ont alerté en juin sur une recrudescence d’intoxications liées à des produits vendus comme du cannabidiol (CBD) mais contenant, sans l’indiquer, des cannabinoïdes de synthèse, rapporte 20 Minutes le lundi 6 octobre. Plusieurs centaines de cas ont été recensés depuis début 2024.
Les deux régulateurs tirent la sonnette d’alarme: plusieurs produits estampillés CBD (huiles, fleurs, e-liquides, gummies) contiennent des cannabinoïdes de synthèse non déclarés. Ces molécules, conçues en laboratoire pour imiter les effets du THC, sont parfois aspergées sur des fleurs ou intégrées à des préparations, avec des effets indésirables sévères.
"Quand un urgentiste m’a parlé d’une intoxication au “CBD”, j’ai d’abord dit que c’était impossible", confie à 20 Minutes Joëlle Micallef, présidente du réseau d’addictovigilance à Marseille. Depuis mars, près de 100 cas y ont été signalés, un chiffre sans doute sous-estimé, puisque moins de 1% des cas sont remontés.
UN CADRE LEGAL FLOU
Depuis l’interdiction du HHC (dérivé du THC) en juin 2023, d’autres composés ont pris le relais, comme le 10-OH ou l’EDMB-4en-PINACA, récemment repéré par les douanes sur une fleur de CBD. Ce cannabinoïde de synthèse, puissant et bon marché, serait largement utilisé par des organisations criminelles. Pensées pour contourner les listes de stupéfiants, ces molécules échappent parfois aux analyses courantes.
Le tout se déroule dans un flou juridique persistant. Les aliments au CBD sont théoriquement interdits en France faute d’autorisation européenne, mais toujours commercialisés. Environ 2 000 boutiques opèrent, souvent en s’approvisionnant à l’étranger. Résultat: des produits “HE” (High Effect) ou brownies au Delta 7, fabriqués aux États-Unis, sont en rayon.
"Beaucoup de professionnels sont perdus, ils ne savent pas eux-mêmes ce qui est légal ou illégal", explique un acteur du secteur. Il plaide pour trancher: "Soit on interdit tout effet psychotrope à la fleur, soit on encadre la légalisation du cannabis. Si demain on légalise le THC, toutes ces molécules de synthèse disparaîtront ".
En attendant, les autorités appellent à la prudence: éviter tout produit sans composition claire, fuir les effets "forts", et consulter en urgence en cas de symptômes inhabituels (palpitations, confusion, nausées…).
La consommation n’est pas marginale: 10% des adultes déclaraient avoir consommé du CBD en 2022, selon Santé publique France.