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Tout est en place pour que les 25 prochaines années soient celles de la plus grande disruption technologique jamais observée, à côté de laquelle l’invention de la machine à vapeur et de la sidérurgie modernes au XIXème siècle fera figure de simple préfiguration.
Intelligence artificielle, connexion généralisée des objets, et chute des coûts de production électrique, seront les principaux catalyseurs de cette transformation. Comme toute période de rupture technologique, des pans entiers de l’économie disparaîtront, entraînant par le fond nombre de métiers et d’emplois. Un seul exemple : les véhicules à conduite autonome, voitures ou camion, couplés avec des applications de type Uber, devraient constituer l’essentiel du parc automobile vers 2030, voire avant. Cela veut dire que les métiers de chauffeurs (taxi, PL) sont voués à disparaître. En contrepartie, des millions d’emplois dont nous ne pouvons même pas imaginer la teneur naîtront de ce bouillonnement technologique.
L’enjeu est que les emplois perdus soient très vite retrouvés dans les nouveaux secteurs qui naîtront de la disruption, si possible rapidement, et en évitant, comme au XIXème siècle, que deux à trois générations d’enfants de l’exode rural ne revivent Germinal. Les férus d’économie auront reconnu ici la description du mécanisme de "destruction créatrice" de valeur, décrit par Joseph Schumpeter au début du siècle dernier.
Pour cela, il ne sert à rien d’essayer de freiner l’évolution technologique, comme le gouvernement essaie de le faire en pénalisant certains innovateurs (Uber, AirBnB, etc.), car les freins que nous mettrons à l’innovation ici, seront un cadeau offert aux pays qui auront la sagesse de ne pas le faire.
Bref, la destruction aura lieu, qu’on le veuille ou non. Ce qu’il faut, c’est permettre une création en rapport avec cette destruction. Il faut mettre en place les conditions permettant que se créent massivement et chez nous, ces emplois du futur. Et pour qu’un emploi se crée, il faut que se rencontrent des hommes et femmes capables, un cadre juridique sécurisant et incitatif, et du capital rentable.
Aujourd’hui, nous formons encore des gens capables de trouver leur place dans une économie de l’innovation, quand bien même notre système éducatif produit trop de jeunes peu adaptables, mais la base reste correcte. Par contre, notre cadre juridique est de moins en moins fiable et respectueux de la propriété privée. Quant au capital, nous faisons tout pour empêcher sa formation et sa fructification. Aussi n’est-il pas étonnant que nombre de jeunes à haut potentiel aillent construire leur avenir ailleurs.
Nous devons donc agir sur trois piliers : formation, cadre législatif, et capital. Je me limiterai au troisième ici.
Par idéologie anti-" riches ", nous avons tout fait pour qu’en France, le capital se fixe moins bien qu’ailleurs : Impôt sur les sociétés élevé, taxes sur les plus-values en capital alignées sur l’hypertaxation des hauts revenus, sauf exceptions fluctuant au gré des caprices du législateur, tranches maximales d’impôt sur le revenu dissuasives, se cumulant, pour ceux qui réussissent, à l’ISF, sans oublier l’impôt sur les successions, faussement " moral ", mais vraiment nocif pour la transmission en bon ordre des entreprises familiales.
Nous devons impérativement non pas " revenir dans la moyenne " des autres pays quant au niveau de ces taxes, mais être les meilleurs et les plus attractifs, parce que nous partons d’une situation très dégradée. J’ai eu l’occasion de proposer des plans de " Flat Tax " permettant de nous transformer en véritable paradis fiscal. Je ne prétends pas que ce plan soit le seul envisageable, de multiples variations autour du même thème sont possibles (avec ou sans impôts locaux ? Avec ou sans impôt sur les sociétés ? Avec ou sans plus-values ? Avec ou sans impôts de succession ?) Mais une chose est certaine : la baisse de ces impôts ne devra en aucun cas être compensée par la hausse d’autres impôts.
Si on admet que la somme de nos impôts et nos emprunts publics constituent le coût de la fourniture de ses services par l’État, alors nous conviendrons que " à service égal ", un prix plus faible desdits services nous laisserait plus d’argent dans la poche, et donc ouvrirait à l’économie marchande de nouvelles perspectives en termes de demandes. L’État n’est pas magique, il doit comme tout le monde améliorer son rapport qualité prix pour que ses clients, nous, se portent mieux.
Cette baisse drastique du coût de ses services ne peut être obtenue que par privatisations massives : d’une part, le secteur privé a des incitations plus puissantes que l’État à être rentable, d’autre part, remettre les services de l’État dans le domaine marchand pourrait nous faire réduire la consommation de services actuellement imposés par l’État et dont nous pourrions librement décider d’avoir moins besoin. Pour éviter cela, ces services devraient eux-mêmes s’adapter, ou disparaître, ce qui participerait de l’amélioration globale de leur qualité.
Santé, éducation, télévision, transports, etc… gagneraient, en tant que services, à être privatisés, et la population y gagnerait en termes de compétitivité de son territoire.
Recentrage de l’État sur son "core business" régalien, financement raisonnable de cet État par des impôts raisonnables à taux strictement proportionnel ne pénalisant ni la formation de capital, ni sa fructification, et liberté laissée aux acteurs économiques de trouver les moyens de satisfaire au mieux leurs clients, sous réserve du plein exercice de leur responsabilité en cas d’échec : telles sont les conditions de notre capacité à traverser la plus grande phase de " destruction créatrice " de l’histoire qui s’annonce devant nous.
Inutile de dire qu’aucun parti politique "établi", et aucun de ses leaders, n’ont pris la mesure de ce défi, et ne sont prêts à lancer les grands débats courageux que ces transformations réclament pour que nous ne rations pas le bon train. Nous préférons deviser sur le remplacement des notes à l’école par des couleurs, le nombre de dimanches où nous pourrons commercer librement, et autres futilités.
Ce pays est foutu.
Contrepoint.org