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L'effet nocebo, conséquence étonnante de l'affaire du Levothyrox

L’explosion de plaintes contre le Levothyrox met au jour l'effet nocebo dont l’explication se trouve au fond du cerveau humain.

Dans l'affaire du Levothyrox, sur 3 millions de malades, 62 ont saisi la justice. Mais 9.000 ont signalé crampes, maux de tête ou pertes de cheveux depuis l'arrivée de la nouvelle formule, fin mars. Etrangement, les cas ont explosé cet été, à la suite de la médiatisation de l'affaire. Selon certains spécialistes, une ­partie d'entre eux relèverait d'un effet nocebo ("je nuirai", en latin). L'effet nocebo? C'est le versant négatif du placebo, "son diable", résume le psychiatre Patrick ­Lemoine*. Le mécanisme est identique: c'est l'effet induit par la prise d'un médicament, qui n'est pas lié à son action pharmacologique mais provoque des symptômes réels et nocifs. La crainte du malade, nourrie par son expérience, sa croyance dans le discours du médecin, du voisin ou des médias, modifie l'activité du traitement. "Les réseaux sociaux amplifient la suspicion. Mais en général, l'expression du nocebo décroît dans le temps", relève Jean-François Bergmann, chef du département de médecine interne à l'hôpital Lariboisière, à Paris. A Hongkong, l'anorexie a explosé dans les années 1990 après la médiatisation de cette pathologie, invisible jusqu'alors.

L'effet nocebo se perçoit au quotidien. Scruter la liste d'effets secondaires sur la notice d'un médicament peut suffire à déclencher un symptôme ; c'est aussi l'effet "blouse blanche", qui fait bondir la pression artérielle dans le cabinet du médecin. Des chercheurs anglais l'ont montré dans une étude sur les statines, menée sur cinq ans et 10.180 patients, parue en mai dans The Lancet. Ils se sont penchés sur les douleurs musculaires perçues comme des effets secondaires de cet anticholestérol controversé. Lorsque les patients ignorent le traitement qu'ils reçoivent (atorvastatine ou placebo), ils affichent le même taux de douleurs. Mais lorsqu'ils se savent sous statine, la présence de symptômes est supérieure de 41% à ceux du groupe placebo! La seule crainte d'éprouver des effets indésirables peut provoquer l'augmentation des douleurs, conclut l'équipe.

François Gueyffier, du service de pharmacologie clinique des Hospices civils de Lyon, cite l'exemple de l'IEC, un traitement de l'hypertension: "Chez 5% des patients, ce traitement entraîne une toux assez ­sévère. Or, si l'on mène une étude visant à identifier spécifiquement combien de patients sont sujets à cette toux, ils seront 20 à 30% à s'en plaindre." A Lariboisière, Jean-François Bergmann évoque le cas du traitement de la sclérose en plaques. Une injection régulière d'interféron peut entraîner un syndrome proche de la grippe (fièvre, frissons). Lors d'une étude, la moitié de ses patients ont reçu le médicament, l'autre du sérum physiologique. "Or 23% de ceux-ci ont quand même décrit des symptômes grippaux. Parce que la notice d'information de l'essai indiquait que l'interféron génère ces symptômes."

"Une information éclairée, avec un éclairage tamisé"

Ce ne sont pas des malades imaginaires. "C'est toute la puissance du cerveau", insiste François Gueyffier. L'effet nocebo est notamment lié à la sécrétion de dopamine et d'opioïdes qui influent sur la perception de la douleur. "Le nocebo, c'est un médicament qu'on fabrique soi-même, avec ses effets secondaires", résume le psychiatre Patrick Lemoine. "Si je vous prescris de l'aspirine en vous alertant sur le fait que cela peut perforer l'estomac, votre organisme est en alerte et fabrique du cortisol. Or cet excès de cortisol, lié à votre peur, peut perforer votre estomac."

La qualité de l'information délivrée au malade se révèle cruciale. "Etre exhaustif sur les effets indésirables, c'est terrorisant. Si on ne l'est pas, on nous accuse de cacher des choses. C'est un peu insoluble", ajoute Jean-François Bergmann. Critique sur le manque de réactivité de l'agence du médicament sur le Levothyrox, il juge que la solution réside dans la relation de confiance entre soignant et malade: "Il faut fournir une information éclairée, mais avec un éclairage tamisé." En d'autres termes, insiste François Gueyffier, hiérarchiser les effets et entendre le patient s'il ne supporte pas le médicament.

En janvier, 11 vaccins de petite enfance seront obligatoires. Si médias, médecins et autorités ne font pas œuvre de pédagogie, le psychiatre Patrick Lemoine parie déjà sur l'effet nocebo, avec un boom en perspective d'effets secondaires signalés.

* Le Mystère du nocebo (Odile Jacob).

Le psychiatre devrait arrêter de fumer sa moquette. J'ai une amie qui prend du Lévo machin depuis un an et demi… et depuis ce printemps, elle se traînait, n'avançant plus aussi bien, une fatigue intense inimaginable; de plus, elle ne dormait plus du tout et je parle par des douleurs….

C'est en entendant parler de toutes les femmes qui se plaignaient des effets secondaires de ce médicament qu'elle a pu, enfin, savoir d'où provenaient ces symptômes invalidants.

Alors, raconter l'explosion des nocébo… je rigole!

 

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