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Bourdin-Plenel

Emmanuel Macron face à un "duo d’hommes blancs de plus de 60 ans"

C’est un symptôme doublé d’une mise en abyme. Qui aurait, hier encore, imaginé que le président de la République puisse choisir d’être interrogé, à sa convenance, par deux personnalités aussi éloignées que Jean-Jacques Bourdin, (68 ans, RMC/BFM-TV) et Edwy Plenel (65 ans, Mediapart). Et, mieux encore, que le second accepterait. Ce sera pourtant le cas: dimanche soir 15 avril, à partir de 20h 35 (à suivre, au choix, sur BFM ou sur MediapartLive).

On imagine sans mal RMC/BFM se réjouir de l’aubaine – et les responsables et journalistes de la télévision publique enrager. Le poisson est nettement plus difficile à avaler du côté de Mediapart – un modèle journalistique aux antipodes économiques et idéologiques du co-invité. Cela donne un étrange texte de justification de la rédaction dirigée depuis sa création par Edwy Plenel. Un texte à lire (gratuitement) sur le site de Mediapart . Extrait:

" Deux intervieweurs, donc: Edwy Plenel (président et directeur de la publication de Mediapart) et Jean-Jacques Bourdin (rédacteur en chef de RMC et animateur de " Bourdin Direct " sur BFM-TV). Et pas dans nos locaux, mais à l’Élysée ou dans un lieu culturel.

" Autrement dit, Mediapart n’est plus la puissance invitante, et la rédaction n’est pas conviée à la table de l’entretien. Le collectif journalistique cède la place à un duo d’hommes blancs de plus de 60 ans, désigné par le président: zéro parité, zéro diversité, personnalisation poussée à l’extrême (sic)".

Qu’allait faire Mediapart face à ce dilemme médiatique, journalistique, idéologique et économique?

" Pour toutes ces raisons, cette invitation ne va pas de soi. Et pour une autre encore: comment un journal comme Mediapart, qui dénonce avec constance le présidentialisme et le fonctionnement de la Ve République, peut-il se plier à cet exercice convenu de l’interview présidentielle, symbole par excellence de la dérive monarchique du pouvoir? Tout le monde a en tête quelques-uns des pires entretiens réalisés depuis soixante ans. Comment subvertir ce dispositif anti-démocratique, et toutes ses contraintes? "

Petit bijou dialectique

Au final, en toute transparence mais pas sans contorsions qui font songer aux anciens jésuites, l’équipe de Mediapart a, " après en avoir longuement discuté collectivement " décidé d’accepter la proposition élyséenne.

" Après plusieurs échanges préalables, nous avons aussi considéré qu’une association avec Jean-Jacques Bourdin, questionneur offensif et lui aussi déterminé à briser les codes du sacro-saint entretien présidentiel, pouvait autoriser cette tentative de rompre avec six décennies de ronronnement et de pompe présidentielle".

Avec, en prime, ce petit bijou de rhétorique et de dialectique:

" Il ne fait de doute pour personne que les lignes éditoriales et les modèles économiques de Mediapart et du groupe BFM-TV/RMC ne sont pas les mêmes: cette différence, par respect du pluralisme, ne doit pas nous interdire de collaborer avec d’autres. Être ouverts dans le cadre d’une relation loyale et respectueuse est le meilleur moyen d’être nous-mêmes, à l’image de notre fil conducteur, au cœur du Festival de nos dix ans: produire quotidiennement un journalisme sans concession à la rencontre de la société".

En une phrase: comment des journalistes, fussent-ils des hommes blancs âgés de plus de 60 ans, pourraient-ils laisser passer une occasion de faire tout simplement le métier qui est le leur? Ce sera oui. On applaudit. Et l’on peut, ce soir, imaginer le président Macron heureux.

https://jeanyvesnau.com/2018/04/09/bourdin-plenel-emmanuel-macron-interroge-par-un-duo-dhommes-blancs-de-plus-de-60-ans/

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