La biologie, une science " patriarcale " et " viriliste "?
Pour le philosophe Jean-François Braunstein, les discours qui prétendent déconstruire le genre engendrent des conséquences non négligeables sur le monde réel.
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"Gender Identity Clinic"
C’est en 1955 que le terme de "genre" fut pour la première fois utilisé pour désigner le sentiment que l’on a d’être un homme ou une femme, indépendamment de son sexe biologique. L’inventeur de cet usage est un psychologue, John Money, qui estime que le genre est culturel plus que biologique. En éduquant un garçon comme une fille, il devrait être possible de le transformer en fille: Money se fondera sur le cas d’un garçon amputé très tôt de son sexe à la suite d’un accident opératoire qu’il aurait réussi, à la demande de ses parents, à transformer en fille.
On apprendra par la suite que Money avait menti et que son jeune patient avait toujours résisté à ses tentatives de le transformer en fille, et avait fini par se suicider: c’est un double scandale, à la fois scientifique et déontologique. Mais, entre-temps, la "Gender Identity Clinic" de Johns-Hopkins où travaillait Money était devenue un modèle pour toutes les questions de traitement des "dysphories de genre" aux États-Unis: lorsque des patients ne se sentent pas bien dans leur sexe de naissance et veulent en changer, plutôt que d’essayer d’adapter leurs croyances à leur corps, on les encourage à transformer leur corps pour le faire correspondre à leur identité ressentie.
Money n’est que l’initiateur de cette révolution du genre, qui va aboutir progressivement à une véritable évaporation du corps.
Le professeur d’études de genre Anne Fausto-Sterling va ensuite estimer qu’il y a une infinité de sexes et que l’" assignation" d’un sexe à la naissance est une décision arbitraire, produit d’un "mode de pensée binaire". La biologie, qui constate qu’il existe deux sexes dans l’espèce humaine, est disqualifiée comme "patriarcale" et "viriliste". Avec la très influente Judith Butler, on ira encore plus loin : ce n’est pas seulement le sexe qui n’a pas d’existence matérielle objective, mais aussi le corps.
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"Dysphorie de genre"
Si tout cela n’était que rêveries ou performances d’adultes consentants, il n’y aurait rien à redire. Mais aujourd’hui, c’est à des enfants de six ans, en Écosse ou ailleurs, que l’on enseigne: "ton genre, c’est toi qui le décides".
On imagine sans mal leur perplexité face à un tel choix. Pourtant, ce sont des enfants de six ou huit ans qui sont aujourd’hui héroïsés dans de nombreuses émissions télévisées ou films parce qu’ils veulent changer de sexe. Certains psychiatres, au lieu de prendre le temps d’écouter l’enfant et ses parents, diagnostiquent immédiatement une "dysphorie de genre" et font entrer ces enfants dans un parcours de "transition de genre", avec bloqueurs de puberté, hormones pour changer de sexe et opération à leur majorité.
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Comme le dit le philosophe Ian Hacking, les catégories des sciences humaines "fabriquent des gens". Les idées ont des conséquences et les idées folles ont des conséquences ravageuses.
L’article dans son intégralité sur Le Point
Le déni de la biologie prend tellement le pas sur la réalité qu’il inquiète jusque dans les hautes sphères décolonialistes. Ainsi, Jean-François Braunstein, spécialiste de l’histoire des sciences et membre de l’Observatoire du décolonialisme, a publié une tribune dans le journal le Point, fustigeant "la déconstruction du genre à la mode dans les milieux universitaires.
"Il s’agit […] de satisfaire les revendications des militants pro-gender qui ont à cœur d’effacer toute différence des sexes. Ces absurdités sont l’un des résultats les plus visibles d’une théorie du genre qui fait son chemin dans les universités américaines depuis une soixantaine d’années ", écrit le professeur de philosophie.
Il faut dire que, depuis quelques années, la biologie est taxée de “patriarcale” et “viriliste”, pour ne reconnaître que deux sexes. Les universitaires comme Anne Fausto-Sterling lui préfèrent les “études de genre” qui permettent de justifier toutes théories plus abracadabrantes les unes que les autres, sous prétexte d’une infinité de sexes. En effet, l’assignation d’un sexe à la naissance résulte, pour ces sociologues du dimanche, d’une décision arbitraire, nullement liée à la biologie. Se servant de Foucault pour appuyer leurs théories, certains, comme Judith Butler, n’hésitent pas à affirmer que "ce n’est pas seulement le sexe qui n’a pas d’existence matérielle objective, mais aussi le corps".
Mais le vrai danger, pour Jean-François Braunstein, provient avant tout de l’influence insidieuse qu’ont ces théories sur la société. " Si tout cela n’était que rêveries ou performances d’adultes consentants, il n’y aurait rien à redire. Mais aujourd’hui, c’est à des enfants de 6 ans, en Écosse ou ailleurs, que l’on enseigne : “Ton genre, c’est toi qui le décides” ", dénonce-t-il avant d’étayer davantage son amer constat, en prenant pour exemple le cas de Keira Bell.
Cette jeune femme anglaise de 23 ans a en effet porté plainte contre Tavistock Clinic, qui l’avait encouragée, alors qu’elle était âgée de 14 ans, à engager une transition dont elle n’était pas en mesure d’appréhender la gravité. "Les idées ont des conséquences et les idées folles ont des conséquences ravageuses", conclut le membre de l’Observatoire du décolonialisme. À trop vouloir déconstruire, il ne restera que des ruines.
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