Cet article pour me rebeller!!!
Est-il juste et réfléchi, de traiter de profiteurs égoïstes tous les gens nés aux alentours de 1950?
La raison de cette accusation est assez astucieuse, en vérité. En accusant toute une génération, on détourne les reproches justifiés qui devraient viser la gauche. Rappelons un seul chiffre: le nombre de candidats au bac en 1968 est de 208 000, soit un peu moins que le quart des naissances en 1950: 862 000.
Autant dire que le mouvement, d’abord estudiantin et qui l’est resté pour une bonne part, au moins dans ses manifestations violentes, ne concernait qu’une minorité des personnes de l’époque.
J'ai commencé à l'usine à 14 ans! et je travaille encore!
es manifestants et agitateurs qui "foutaient le bordel", selon les mots de la bourgeoisie de droite d’alors, étaient surtout des jeunes bourgeois de gauche, souvent enfants des premiers. Souvenons-nous de ce père, bourgeois de droite exaspéré, incendiant lui-même la voiture qu’il avait offerte à son fils, très impliqué dans le mouvement libérateur.
Il serait injuste de jeter tout ce qui est arrivé en 1968, l’ambiance récré, les gens qui se mettaient à se parler, l’augmentation des bas salaires, misérables à l’époque, même si elle fut vite avalée en partie par l’inflation.
On en profitera pour dire, comme beaucoup l’ont oublié, qu’une large proportion de la population restait pauvre à l’époque, même si la prospérité, à grand renfort de voitures, télévisions, machines à laver, etc. commençait à se diffuser dans le pays depuis le début et surtout le milieu des années 1960. Ceux qui croient que la richesse matérielle de la France remonte à loin ont la mémoire courte.
Ainsi, les boomers aujourd’hui mis en accusation ont pour la plupart beaucoup travaillé, pour de petits salaires au début de la période. S’ils n’ont pas connu le chômage, c’est justement parce qu’ils bossaient, fréquemment depuis l’âge de 14 ans. Cela relativise les remarques sur les jeunes d’aujourd’hui, génération sacrifiée qui poursuit des études souvent hasardeuses jusqu’à un âge avancé, quand ce ne sont pas de pures études d’agrément…
Ajoutons que les retraités boomers, qui ont beaucoup cotisé, ont des retraites beaucoup moins avantageuses que celles de la génération précédente, retraites par ailleurs quasiment bloquées depuis six ans au moins, ce qui est une véritable spoliation.
Si aujourd’hui la France va mal, ce n’est pas à l’ensemble des "boomers" qu’il faut le reprocher. En revanche, la gauche notamment issue de mai 68 a une responsabilité écrasante dans la faillite politique, économique et morale que connaît notre pays. Les "petits maîtres" de la gauche soixante-huitarde, comme on les a justement appelés, ont pris le pouvoir en politique mais surtout se sont arrogé le pouvoir moral, relayé par tous les médias, en passant par Libé, Le Monde, Télérama, pour ne citer que ceux-là.
Le pire dans cette affaire, c’est que même les partis dits de droite ont été presque totalement contaminés par les idées les plus destructrices, notamment dans le domaine dit "sociétal". Déjà Maurice Druon notait il y a longtemps: en France, il y a deux grands partis, tous deux de gauche, mais dont l’un est appelé "de droite" par convention.
Nul n’ignore par ailleurs que les petits maîtres ont envahi l’Éducation nationale, réinventant pour les enfants une histoire de France honteuse, esclavagiste, colonialiste, collabo etc. On a bâti une France collabo, où tous ceux qu’on allait bientôt appeler les "Franchouillards" ne pensaient qu’à s’enrichir au marché noir et à obéir servilement aux Allemands.
Tout cela est faux, l’immense majorité des Français détestaient les Boches et s’efforçaient de pratiquer une résistance passive. Il fallait élever ses gosses, et tout le monde n’est pas un héros. Et malgré un antisémitisme très répandu à l’époque, beaucoup de Français ont sauvé leurs voisins juifs.
Aujourd’hui, il est bien commode d’accuser les boomers de tous les maux. Accusons-les, oui, mais en désignant ceux qui ont bâti cette gauche méprisante (qu’on se rappelle le film " Dupont la Joie "), arrogante, se croyant supérieure en tout, et détestant ce peuple qu’elle était censée défendre, mais qu’elle trouvait " pue-la-sueur ", ridicule avec son goût pour le camping et la bière à bon marché.
Certes, les boomers dans leur ensemble n’ont pas su transmettre le merveilleux patrimoine de la culture française et l’amour légitime du pays. Mais il était bien difficile de défendre les enfants et les jeunes contre les puissants "éducateurs" du temps: l’école, la télé, la radio, puis l’ordinateur, le téléphone etc. Beaucoup ont été faibles, lâches, c’est vrai. Beaucoup avaient honte de ne pas avoir les "bonnes idées".
Et c’est d’autant plus terrible qu’une large majorité, sans doute, n’épousait pas les idées et commandements en vigueur. C’est ainsi qu’on a laissé les jeunes s’éprendre d’une vaste entreprise commerciale à succès à base de vulgarité, d’obscénité souvent, de haine presque toujours et, peut-être surtout, de laideur: le rap. Les vieux croyants vous diront que le goût voire le culte de la laideur est "satanique". Mais on sait que la plus grande ruse de Satan est de faire croire qu’il n’existe pas.
Aujourd’hui encore, bouclant la boucle, les enfants de la "gauche caviar", si bien nommée et si désastreuse, font souvent le même choix que la jeunesse dorée de 1968, celui de l’extrême-gauche, des pavés, de la violence et de la casse. Peut-être faut-il en passer par là pour changer d’époque.
On rappellera en passant ce mot du cinéaste italien Pasolini, lequel, sans aimer spécialement la police, déclarait ceci lors de manifs de la jeunesse: "entre les étudiants manifestants et la police, je choisis les policiers, car ce sont eux les vrais fils du peuple".
Mais où sont aujourd’hui les fils du peuple, où est le peuple?
Didier Blonay